Promouvoir la qualité des soins de manière ciblée – comment concilier financement et impact
- Hagr Arobei
- 26 mai
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 30 mai
Les coûts des soins augmentent, la pénurie de personnel qualifié s’aggrave – et de plus en plus de personnes se demandent comment garantir la qualité des soins de longue durée tout en assurant leur viabilité financière.
Martin Eling, professeur d’économie de l’assurance à l’Université de Saint-Gall (HSG), évoque dans une interview d’expert des modèles de financement durables, le rôle de l’orientation vers les résultats – et pourquoi les investissements ciblés dans la qualité des soins peuvent être économiquement judicieux.

Prof. Eling, vos études montrent que les coûts des soins de longue durée vont presque doubler d’ici 2050. Quels changements structurels ou systémiques sont nécessaires pour que qualité et viabilité financière aillent de pair à l’avenir ?
Il nécessite une approche en trois volets.
À mon avis, concilier qualité et viabilité financière nécessite une approche en trois volets : premièrement, un allègement ciblé du personnel soignant professionnel grâce à des processus assistés par la technologie et à une meilleure répartition des tâches. Deuxièmement, des incitations plus fortes à la prévention et au logement encadré, afin d’éviter ou de retarder les soins en établissement. Et troisièmement, un réajustement du financement qui répartisse équitablement la charge entre l’État, les assurances et les individus – notamment compte tenu des importantes contributions personnelles.
Dans quelle mesure estimez-vous qu’une plus grande orientation vers les résultats dans la rémunération des soins de longue durée est nécessaire – par exemple en tenant compte de résultats mesurables tels que la satisfaction des résidents, le bien-être psychosocial ou la prévention de l’isolement social ? Quelles opportunités ou risques économiques cette orientation pourrait-elle entraîner ?
Il peut constituer un levier pour promouvoir la qualité des soins de manière ciblée.
Une plus grande orientation vers les résultats – par exemple à travers des indicateurs de qualité de vie, de satisfaction ou de prévention de l’isolement – peut constituer un levier pour promouvoir la qualité des soins de manière ciblée. D’un point de vue économique, l’avantage réside dans une utilisation plus efficiente des ressources : les fonds sont dirigés là où ils conduisent réellement à de meilleurs résultats. En parallèle, il existe un risque que des prestations de soins complexes soient trop simplifiées ou standardisées si seules certaines données mesurables sont récompensées. Il est donc essentiel d’adopter une approche équilibrée et fondée sur des preuves.
D’un point de vue économique, existe-t-il de bonnes raisons d’investir spécifiquement dans la qualité des soins – par exemple dans des équipes stables, un accompagnement individualisé ou des offres sociales volontaires – même si cela peut engendrer des coûts plus élevés à court terme ?
[...] il s’agit d’investissements préventifs avec un potentiel de rendement à long terme.
Oui, tout à fait. Les investissements dans des équipes stables, un accompagnement individualisé et des offres sociales peuvent non seulement accroître la satisfaction des personnes nécessitant des soins, mais aussi réduire les coûts à long terme – par exemple grâce à une diminution des hospitalisations ou à une moindre rotation du personnel. D’un point de vue économique, il s’agit d’investissements préventifs avec un potentiel de rendement à long terme, tant sur le plan financier que sociétal.
La part des coûts des soins supportée par les personnes dépendantes est déjà élevée en Suisse en comparaison internationale. Quelles mesures pourraient être prises pour réduire cette charge financière sans compromettre la durabilité du système ?
Il faut une répartition plus équitable des coûts des soins.
À long terme, il faut une répartition plus équitable des coûts des soins. On peut envisager, par exemple, des assurances complémentaires obligatoires pour les soins, avec un barème social, ou un fonds de prévoyance pour les soins, alimenté dès la vie active. En parallèle, il convient d’exploiter les réserves d’efficacité du système – par exemple via une prise en charge coordonnée, une meilleure numérisation ou la réduction des incitations inadéquates. Ce qui est déterminant, c’est que le soulagement des personnes dépendantes ne se fasse pas au prix d’un sous-financement structurel du système.
Face à l’évolution démographique et à la hausse des coûts des soins : quel rôle attribuez-vous aux technologies innovantes, comme les robots soignants, et aux mesures organisationnelles, telles que la revalorisation des professions de soins, pour améliorer l’efficacité et la qualité des soins de longue durée ?
La technologie et l’organisation ne sont pas des fins en soi, mais doivent être utilisées de manière ciblée pour renforcer les soins humains.
Les technologies comme les robots soignants ou les systèmes d’assistance numériques peuvent prendre en charge des tâches routinières et ainsi soulager le personnel soignant – elles ne remplacent cependant pas la proximité humaine. La revalorisation des professions de soins est encore plus importante : par de meilleures conditions de travail, des perspectives de carrière et une reconnaissance sociale. Ce n’est qu’en parvenant à attirer et fidéliser davantage de personnes dans cette profession que l’on pourra garantir la qualité des soins de longue durée. La technologie et l’organisation ne sont pas des fins en soi, mais doivent être utilisées de manière ciblée pour renforcer les soins humains.
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